Usti, jeudi 30 8bre, la crise qui couronne l’œuvre

L’éveil fut différent, car après s’être délicatement entretenue avec mon acolyte pour préparer ses adieux, Petra vint me voir pour les mêmes motifs, mais j’en pris plus de plaisir car nos bouches s’unirent dans une fièvre qui ne put s’interrompre que par le son d’une énorme cloche. Elle disparu précipitamment pour ménager son retard. J’étais enivré de bonheur. « Il y a dans l’air de la chambre à coucher de la femme qu’on aime quelque chose de si intime, un air si balsamique, des émanations si voluptueuses, qu’un amant obligé d’opter entre le ciel et ce lieu de délices ne balancerait pas un instant dans son choix. » Nous passâmes la journée à ne parler que de la nuit passée et de celle à venir. Nous devions partir le jour suivant. Nous apprêtions nos effets quand elle revint de son service. Nous étions persuadés l’un comme l’autre que notre belle trinité de la veille était parfaitement harmonieuse. Or un détail nous incitait à la prudence : nous ne savions pas si Rémi était, ou non, épris secrètement de sa belle voisine de chambre. Nous hésitions sur ce point, toujours enclins à ne pas entreprendre d’indélicatesse. Je surprenais mon compagnon en train de parler à Petra : « Quoique très vigoureux, ajouta-t-il, dans l’action amoureuse, il a une peine infinie à se procurer la crise qui couronne l’œuvre, et quand la malheureuse qu’il inonde de volupté à force de l’irriter a le malheur de ne pouvoir cacher son extase, elle court le risque d’être étranglée par cette âme féroce, tant il est jaloux du bonheur d’autrui. » N’ayant l’air de sans soucier de ces mystérieux propos, notre pieuse amie nous invita à l’accompagner aux thermes d’Ustina. Les eaux de cette contrée sont légèrement salées et à température idéale pour se baigner. Nous essayons le toboggan, le grand bassin, les saunas, les bains à remous. Je jouissais de ces moments d’intimité pour badiner avec Petra et lui voler quelques baisers qu’elle ne distribuait que très doucement. Nous nagions dans un intense bonheur.

Rémi nous avait donné rendez-vous au même bouge où il avait chanté le jour de notre arrivée. Il était là avec Horda et d’autres charmants amis. Il nous raconte son périple et en vient à nous parler de Petra. Je bénis qui s’unira a elle, car ce sera une personne comblée, disait-il en référence à son expérience de vie avec elle. Celui-ci à ma droite la désire depuis longtemps, celui-là l’aime mais n’a pas réussit à conquérir son cœur. Il est pourtant très beau, contestais-je étonné. Certainement, repris Rémi, mais Petra reste seule ! Le mystère notre belle amie ajoutait à notre bonheur. Nous dînâmes tous ensemble puis Petra partit rattraper ses prières. Elle ne me dit au revoir que par un regard prometteur. J’en fus fort bouleversé. Enfin Rémi nous montra quelques reportages concernant ses activités riches et variées. Puis, un film assez médiocre assoupit tout le monde sauf moi ; j’ai toujours l’affreuse patience d’attendre la fin des représentations artistiques, même des plus minables. Le sommeil des uns et des autres me permit de pénétrer les inspirations de mon cœur. Je raccompagnais mon compagnon jusqu’à sa banquette, où nous discutions encore quelques instants. Je concluais par un nouvel élan à l’attention de Petra. Surgissant l’un après l’autre sous son baldaquin, nous lui renouvelons les caresses de la veille auxquelles elle répondait avec plus d’entrain. Toutefois, quand nous commencions à nous échauffer, la belle nous fit comprendre qu’elle avait fait un choix. Je fus l’heureux élu. Nous jouîmes des heures qui restaient en sacrifiant sur un temple plus savoureux que celui de la veille. Le bonheur extrême que nous goûtions était sans doute unique, et nous y mettions toute notre foi à l’élever au pinacle. Nous savions que le lendemain serait un adieu. Cet évènement ajoutait encore l’ardeur de nos effusions de tendresse. Elle partit pleine de tristesse pour son labeur quotidien, et nous partagions nos derniers baisers dans les pleurs.


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